Monique de Gouy d'Arsy
Comtesse des Salles 1769-1787
Comtesse O'Mahony 1787-1823
Armoiries de la famille de Gouy d'Arsy
II.- Comtesse O'Mahony 1787-1823
Armoiries de la famille O'Mahony
Le 26 mai 1787 Monique se marie en secondes noces à «
Très haut
et très puissant seigneur Messire Barthélemy comte O'Mahony mestre de camp du régiment
de Berwick, chevalier de l'ordre royal et militaire de Saint-Louis, chevalier non profès de
l'ordre de Malte, gouverneur châtelain des ville et châtellenie de Cateau-Cambrésis. » Les
futurs époux demeurent à Paris, 1 rue du Regard pour l'un et au vieux
Louvre pour l'autre, mais le contrat fut établi à Vaucouleurs (Meuse) par devant Me Georges (le 24 mai avec expédition envoyée à Me Trutat à Paris le 2 pluviose
an II) et le mariage eut lieu au
château de Malpierre à Rigny-la-Salle (Meuse) dans ce qui semble être l'intimité puisque seuls étaient
présents le vicomte de La Rochelambert [Henry Gilbert de La Rochelambert, sans doute le frère du marquis qui portait le même prénom], le marquis de Montbail [Pierre-Daniel de Rorthays], le comte de
Chamoy [Louis François Rousseau de Chamoy, aussi comte de Charbonnières et baron d'Authan par achat en 1784] et le comte de Saint-Maimon, témoins des mariés. Les bans avaient
été publiés à Paris et à Saint-Martin-de-Ré où était cantonné le régiment de
Berwick. La comtesse des Salles fait place à la comtesse O'Mahony ...
Extrait des registres des mariages de Rigny-la-Salle
cachet montrant les nouvelles armoiries de Monique,
avec les armes O'Mahony à gauche et Gouy d'Arsy à droite.
On notera la forme britannique des écus et la couronne irlandaise (et non celle de comte français).
Armoiries dessinées sur l'arrêt de noblesse
Le 11 novembre suivant nait en l'appartement du Vieux Louvre un fils, Arsène. Sa demi-sœur Aurore a huit ans.
Le 17 avril 1788 l'architecte des Bâtiments du Roi, Maximilien Brébion, répond à Monique, ou plutôt à Bathélemy ! au sujet des travaux demandés par Monique (A.N. O1 1674 bobine 2) :
Monsieur le comte de Mahony,
Depuis que vous m'avez fait l'honneur de m'adresser la dernière demande que nous a fait Madame la Comtesse des Salles, présentement Comtesse de Mahony, il lui a été expliqué, Monsieur le Comte, par M. Renard l'utilité de s'assurer par elle-même du consentement de Messieurs les Ducs et Pairs, et de M. de Champlost son voisin, pour obtenir le reculement d'une cloison qui sépare leur jouissance au Louvre de la cage d'escalier qu'il s'agit depuis longtemps de reconstruire vu son était dangereux.
Ce reculement de cloison pour rendre l'escalier plus commode, vient d'être consenti depuis quelques jours par Messieurs les commissaires des Ducs et Pairs et par Mr. de Champlost, chacun pour ce qui le concerne, et l'ouverture ou entrée de l'escalier peut être prise par le vestibule sans qu'il soit question d'un percement de mur, ainsi que nous l'expose Madame de Mahony dans sa lettre ; il ne s'agit que de supprimer une des boutiques dont jouit le Gouvernement du Louvre, et dès lors cette nouvelle entrée aura lieu, et sera semblable à celle de l'escalier de M. de Bartouilh, et au mieu [milieu] sous le vestibule du côté de l'Oratoire.
M. de Champlost a consenti, Monsieur le Comte, à cette suppression de boutique, au moyen du dédommagement qui sera donné par Mr. Et Madame de Mahony à la personne qui en jouit.
Si la négociation que Madame de Mahony vient de terminer à sa satisfaction avait eu le même succès il y a plus de deux ans, elle jouirait, Monsieur le Comte, de la reconstruction de son escalier que vous avez autorisé sur le compte que j'ai eu l'honneur de vous rendre dans le temps et qui a été compris sur l'état des ouvrages à traiter en 1786. Si vous agréez de nouveau la demande de Madame de Mahony, le reculement de la cloison dont il s'agit, ne peut opérer au total un supplément de dépense de plus de trois ou quatre cent livres ; et il ajouterait infiniment à l'agrément et à la commodité d'un escalier qui est particulier à un des plus beaux logements du Louvre.
Je suis avec respect,
Monsieur le Comte,
Le 30 avril suivant, la duchesse de Fitzjames, dame du Palais de la Reine, présente Monique au Roi, à la famille
royale, et à la cour (son habit de présentation lui coûtera 2 400 livres). Le Roi n'accordait l'honneur de lui être présenté
qu'aux "femmes de ceux qui sont isus d'une noblesse de race". Il fallait pour cela qu'elle ait produit "trois titres sur chacun des degrés de la
famille de son époux (...) par lesquels la filiation sera établie clairement depuis 1400".
Barthélemy avait obtenu les honneurs de la cour en janvier.
Marie-Claudine de Thiard de Bissy épouse de Jacques-Charles, duc de Fitz-James,
colonel propriétaire du régiment de Berwick (1763) dont Barthélemy avait été nommé colonel commandant le mois précédent.
-miniature de Jean-Laurent Mosnier au musée du Louvre-
la charte de droite montre les liens entre les O'Mahony et les Fitz-James
Depuis le mois d'avril 1788, le régiment de Berwick, dont Barthélemy a reçu le commandement, cantonne à Boulogne-sur-Mer.
Les O'Mahony y ont un logement d'où Monique adresse le 25 juin une plainte concernant, une fois encore, les travaux de l'appartement du Louvre :
Permettez, Monsieur, que je vous porte les plaintes les plus amères sur la manière dont je suis jouée, sans doute à votre insu, par messieurs des Bâtiments. Vous vous rappelez qu'il y a 4 ans j'eus l'honneur de vous écrire, pour vous demander d'ordonner la construction de l'escalier de l'appartement que j'occupe au Louvre ; vous vous fîtes rendre compte des motifs de ma demande et, sur le témoignage qui vous fût rendu qu'elle était non seulement juste, mais même indispensable, vous eûtes la bonté d'y accéder et de me promettre, par une lettre que j'ai bien gardée, que dès le printemps suivant (je vous fis cette demande vers le mois de février ou mars) mon escalier serait refait.
Je me suis préparée, en conséquence, à aller passer tout l'été à la campagne pour laisser faire cet ouvrage ; mais je tombai malade, je ne pus partir qu'au mois de juillet, et on me prévint qu'on allait faire mon escalier ; on me fit en conséquence déménager, démeubler, puis on ne le fit pas, et l'on m'en donna pour raison que j'étais partie trop tard et que la saison était trop avancée pour entreprendre cette besogne.
L'année suivante, je renouvelai mes demandes, on me renouvela les promesses, je partis encore, je fus 5 mois absente, et trouvai mon escalier comme je l'avais laissé, et tombant de plus en plus. Je m'en plaignis, on me donna pour raison que l'appartement de la Reine, aux Tuileries, avait employé tous les fonds, et tous les ouvriers. L'année suivante, nouvelles demandes de ma part, nouvelles promesses de ces Mrs., je pars et suis absente 13 mois, je retrouve à mon retour mon même escalier, et comme l'on ne pouvait pas me donner les mêmes défaites que les années précédentes, on me donna celle de la brulure [incendie] du pavillon de Flore. Enfin cette année, ennuyée d'être ainsi ballottée depuis 3 ans, et voulant être sure de mon fait, mon escalier d'ailleurs ne pouvant plus subsister, parce qu'il tombe de partout, je me disposais, Monsieur, à avoir l'honneur de vous voir, pour avoir de vous une promesse formelle et des ordres positifs à ces Mrs., mais avant j'ai voulu les voir et les ai trouvés si disposés à mettre à exécution vos ordres de 4 ans, que j'ai jugé superflus de vous importuner ; ils m'ont assuré et répété 100 fois que non seulement on ferait mon escalier, pour lui-même, mais que . on ne pouvait y consentir parce que la réparation étant si urgente qu'elle ne pouvait plus attendre ; on m'a en conséquence communiqué tous les plans, on m'a fait faire auprès de Mr. de Champlost et de Mrs. les ducs et pairs, mes voisins, toutes les démarches possibles et nécessaires afin que rien ne retarde cet ouvrage ; on m'a assuré et répété plusieurs fois que vous l'aviez ordonné de ? et que vous l'aviez compris dans les dépenses de cette année, on m'a pour la 4ème fois fait déloger, et obligée à emmener tous mes gens, mon enfant même qui est en nourrice, pour que rien ne s'oppose à ce travail ; on m'a assuré, répété, que le lendemain de mon départ on y mettrait ? ; rien ne devait me paraitre plus certain.
Cependant, il y a aujourd'hui un mois que je suis partie, et non seulement l'on n'y a pas travaillé. J'ai écrit il y a 15 jours à M. Brébion et à M. Renard pour les presser de faire commencer la besogne, et ni l'un ni l'autre n'ont pris la peine de me répondre ; tout ce que j'ai appris, par ceux de mes gens que j'ai laissé chez moi, et que j'ai chargé les voir, et d'en avoir une réponse, que les ??, que mon escalier ne serait point encore fait cette année, parce qu'il manquait de fonds.
C'est d'après cela, Monsieur, que je me suis décidée à avoir l'honneur de vous écrire, pour savoir, par vous-même, sur quoi je dois compter, et pour vous instruire des détails que vous ignorez surement ; parce que vos paroles ne peuvent être illusoires, et la lettre que vous m'avez écrite il y a 4 ans (en note : apparemment le 15 juin 1784) est mon titre pour réclamer votre justice dans cette circonstance. Je sais, Monsieur, qu'il est d'usage que vous renvoyiez à ces Mrs. toutes les demandes qui vous sont faites, je pense donc que cette lettre ci leur sera renvoyée, mais comme elle contient vérité la plus exacte, je ne crains point leur témoignage. Il est constant, Monsieur, que mon escalier tombe de partout, et qu'on ne peut le monter, ni le descendre, sans risque de s'y rompre le col, il est tout aussi vrai que le gros mur est pourri, par une cheminée de latrines qui y passe, que les plafonds le sont de même, que celui de mon antichambre est tombé l'année dernière, que la moitié de mon appartement est infecte parce que les murs et les planchers distillent ce qu'il y a de plus puant, et que cela pleut sur la tête au moins 10 mois de l'année. Tout cela sont des faits qu'on ne peut révoquer en doute, et dont il vous est facile de vous convaincre ; si cela ne s'appelle pas des réparations urgentes, et très urgentes, je ne sais pas ce qui doit en porter le nom. Et ces réparations ne peuvent se faire qu'en faisant l'escalier, l'escalier que vous m'aviez accordé il y a 4 ans, Monsieur, comme chose juste et pressée, et qui l'est assurément devenu bien davantage par le laps de temps qui s'est écoulé depuis. C'est pourtant cela qu'on me refuse. Sûrement, Monsieur, vous n'en êtes pas instruit parce que vous ne pouvez pas tout voir par vous-même, mais si je charge le tableau d'un seul mot, je consens non seulement à ce qu'on ne fasse jamais mon escalier mais à perdre l'appartement que je tiens des bontés du Roi, et qui est dans ma famille depuis 5 [4 en fait] générations.
Pardon, Monsieur, d'un détail aussi long et aussi sale, et de vous faire perdre un temps que vous pourriez beaucoup mieux employer à lire une aussi fastidieuse épitre ; il n'a pas tenu à moi de vous éviter cette importunité, ni le voulais assurément ; je n'ai cessé de m'adresser pour cela aux personnes chargées de votre confiance et qui connaissent la vérité de ce que j'avance, mais lorsque je vois que je n'en puis pas obtenir la chose la plus juste, et même la plus intéressante à la sûreté du bâtiment qui tombe absolument, je dois penser que vous n'êtes point instruit et m'adresse à vous directement en ne vous laissant rien ignorer. D'après cela, Monsieur, j'attendrai votre réponse avec impatience, et je vous renouvelle mes excuses de mon indispensable prolixité, et l'assurance de tous les sentiments avec lesquels j'ai l'honneur d'être, Monsieur, votre très humble et très obéissante servante.
Signature de Monique au bas de la lettre
annotation portée sur la lettre : "Répondu ce 23 juillet en combattant ses plaintes exagérées"
Le 31 juillet Monique (et son mari) reçoivent le prince de Condé et son fils arrivés à Boulogne. Le vicomte Desandrouin avait prêté son hôtel à cet effet.
"Toute la dépense a été faite aux frais de M. Mahony ; il y avait un très beau souper ; entre autres plats, une carpe de Camiers pesant douze livres."
Le procès verbal de l'Assemblée générale des trois ordres du bailliage de Chaumont-en-Bassigny, en Champagne, qui se tint le 12 mars 1789, liste les participants.
Pour la noblesse, on y trouve « Ch.-F. Maillart, maréchal des camps et armées, pour lui et pour Marie-Louise-Henr.-Monique Degony (sic, de Gouy), veuve de très haut et puissant
seigneur Louis-Ant.-Gust., comte des Salles, maréchal des camps et armées, actuellement épouse de haut et puissant Sgr Barthélemi, comte de Mahony, chevalier honoraire de Malte,
colonel du régt Berwick, et pour Melle Dessales, dame engagiste des domaines de la prévôté de Vaucouleurs, du fiel de Malpierre et d'Uny ».
Barthélemy n'est pas cité comme y siégeant car il était présent aux États de Cambrais et du Cambrésis où il s'était fait inscrire en 1781.
Les O'Mahony habitent alors au château du Louvre comme l'indique un acte passé devant notaire le 20 avril 1789 par lequel Bathélemy est nommé cotuteur
de sa belle-fille Aurore, avec le marquis de Gouy (grand-père),
le duc de Montmorency-Luxembourg (parent), le vicomte de Gouy (grand-oncle), le duc de Villars-Brancas (grand-oncle), le marquis de Gouy d'Arsy (Louis Marthe, oncle), le marquis de Lusignan et le duc de Céreste. De plus, Barthélemy est
autorisé, ainsi que son épouse, à procéder à la liquidation de la succession du marquis des Salles [Règlement de la succession Louis-Antoine-Gustave des Salles (1772-1785) - AD des Vosges 3 F 4].
Le 26 janvier 1789 Monique se rend chez Me Trutat pour éteindre plusieurs dettes dont une de 3 000 livres à Jacques Lesterlin, son maître d'hôtel, une de
2 680 livres à Antoine Bouardel, également son maître d'hôtel, une autre de 2 257 livres à Joseph Abot, bourgeois de Paris et enfin une
de 2 044 livres à Mathieu Collineau, négociant à Paris. Elle peut régler ces sommes grâce à celle de 10 000 livres qu'elle a reçue de son père
"pour des causes exprimées en
une quittance insérée dans un acte passé devant Me Trutat" le 25 janvier.
Le 28 avril 1789 les lettres patentes de reconnaissance de noblesse d'ancienne extraction, obtenues par Barthélemy le 26 septembre précedent, sont
enregistrées au Parlement de Paris [A.N O1 134-135].
Le 25 septembre suivant le marquis de Gouy effectue un emprunt de 10 000 livres moyennant paiement d'une rente annuelle de 500 livres de manière à
rembourser et éteindre les 500 livres de rente au principal de 10 000 livres du à Monique suivant le testament de Madame de La Lande son aïeule (que Louis
de Gouy qualifie indûment de marquise dans l'acte passé par devant Me Trutat).
Le 10 avril 1790 le père de Monique décède à Paris, en son hôtel de la rue de la chaussée d'Antin. Le marquis de Gouy est inhumé le surlendemain
dans le caveau des seigneurs
d'Arsy, sous le pupitre de l'église du village. Cet hôtel particulier, qu'il avait acheté en 1775, se situait à l'angle de la rue de Provence et de la rue de
la Chaussée d'Antin.
Il avait une entrée rue de Provence par une porte cochère à colonne et une autre rue de la Chaussée d'Antin, par une porte cochère simple.
Il consistait en quatre corps de bâtiments.
C'est Aurore des Salles, sa petite-fille, qui en hérite, mais Monique hérite de la jouissance et de l'usufruit, selon le codicille du 8 janvier 1789
par lequel elle perçoit
la somme de 500 000 livres, son argenterie montée, sa cave de Paris, tout le mobilier de sa maison de Paris, et la jouissance pendant sa vie de cette
maison.
Louis de Gouy laissait pour héritiers
présomptifs ses deux enfants Louis-Marthe, qu'il avait marié comme son fils
aîné noble (pour recueillir tous les avantages attachés par les coutumes au
droit d'aînesse) et Monique, veuve en premières noces de M. le comte des
Salles et épouse en secondes noces de M. le comte O'Mahony. Mais il laissa
en fait un testament (14 mai 1787) et cinq codicilles (14 mai 1787, 11 juin
1788, 18 janvier 1789, 1er et 8 mars 1790), déposés chez maître Trutat,
notaire à Paris. Ces testament et codicilles contiennent beaucoup de legs,
dans lesquels on distingue des legs de rentes, de pensions viagères, de
récompense, d'amitié et de reconnaissance, des legs de sommes une fois
payées et des legs d'effets en nature. Celui du 18 janvier 1789 contenait la
disposition suivante : « Je révoque par ses présentes les dispositions de mon testament
relatives à Madame la comtesse O'Mahony, ma fille. Au lieu et place du legs universel que
je lui faisais, je lui lègue une somme de 400.000# une fois payés les 100.000# qu'elle a
droit de prendre aux termes de son contrat de mariage, et des 200.000# légués par mon
codicille à ma petite fille Aurore des Salles, lesquelles seront prises sur ma succession et non
sur Madame O'Mahony. Je veux que des dits 400.000# il soit fait emploi d'uns somme
de 200.000# en acquisition de rentes ou immeubles au profit de ses enfants nés et à naitre,
autres néanmoins que ma petite fille Aurore des Salles (...) Je lègue en outre à Madame
O'Mahony, ma fille, la jouissance et usufruit de la totalité de l'hôtel que j'habite entre la
rue de Provence et la Chaussée d'Antin, avec les meubles garnissant le dit hôtel ;
et j'en lègue la propriété à ma petite fille Aurore des Salles, outre le legs des 200.000# que
je lui avais fait. » Mais par une clause particulière il laissait Monique libre de se porter héritière légitime
si elle ne voulait pas se conformer aux conditions de ce codicille.
Le marquis laisse une succession
lourdement grevée de dettes et dans un grand désordre. De plus des difficultés surgissent entre Monique et son frère Louis-Marthe que le testament
désavantage à la suite de désaccords
survenus avec son père peu de temps avant. Monique passera le reste de sa vie de procès en procédures pour récupérer ce qui lui revient de cette succession ainsi que de
celle de sa mère, comme nous le verrons.
L'hôtel particulier de la Chaussée d'Antin
Un état des logements du Louvre en 1790 signale l'
escalier de Mme la comtesse de Mahony : Logement au 1er et entresol au dessus, dont une partie double sur la rivière.
Le 8 mai 1790, Barthélemy fait l'acquisition d'un hôtel particulier à Nancy, connu sous le nom d'
Hôtel O'Mahony,
et le 22 septembre Monique écrit
une lettre aux autorités militaires, datée du château de Malpierre (voir
ici). Nancy, où plusieurs lettres de Monique montrent qu'elle y séjournait
généralement, est idéalement situé pour
qu'elle s'occupe des biens de son premier mari, notamment de Rigny-la-Salle, ce qui explique sûrement en partie
le choix de cet achat. On sait par exemple que, le 11 mai 1791, les récollets de Bulgnéville ayant abandonné leur couvent,
et le directoire du district de Neufchâteau se proposant de le vendre comme bien national, elle fit opposition à cette décision en tant que tutrice de sa fille mineure.
En 1791 Louis-Marthe vend les meubles de la maison de la Chaussée d'Antin après que sa mère en ait retiré l'argenterie et autres meubles et effets (évalués environ 30 000 livres)
pour lui
tenir lieu de son préciput de 20 000 livres.
Cette vente s'est faite pour 40 000 livres (voir inventaire chez Me Trutat le 31 août 1791).
La nouvelle de l'arrestation du Roi en juillet 1791 vient surprendre les O'Mahony à Nancy. Comme pour beaucoup d'autres, cette nouvelle les décide à
émigrer et Barthélemy, Monique, Aurore et Arsène quittent la France.
Commence alors pour Monique et sa famille une vie sur laquelle on connait
peu de choses sinon des lieux de résidence durant les 3 années passées en
Allemagne : Landau, Manheim, Mayence, Neuwied et Coblence (Koblenz) où les O'Mahony ont loué un appartement au baron d'Esch du
1er novembre 1793 au 1er septembre 1794.
Depuis la prise de Spire par
les français du général Custine le 30 septembre 1792, c'est la panique à Mayence où se trouve Monique :
les régiments du duc de
Nassau évacuent la forteresse le 5 octobre ; l'électeur, les évêques du
chapitre, les aristocrates et leurs domestiques quittent précipitamment la ville.
Dans une lettre Monique signale avoir perdu
tous ses effets et plusieurs
registres et mémoires quand les Français sont entrés à Mayence en octobre.
Afin d'assurer la saisie de tous les biens des émigrés, la Convention ordonne par la loi du 28 mars 1793 la formation, l'impression et la publication de listes départementales
d'émigrés, ainsi que la confection, à l'aide de toutes celles-ci, d'une liste générale qui serait envoyée et publiée dans toute la République. Tout individu inscrit sur ces listes
était réputé émigré, banni à perpétuité du territoire français, puni de mort en cas de rentrée ou déporté si c'était une femme de moins de 21 ans, et si elle rentrait
seulement pour la première fois.
Mort civilement, il était représenté par la nation qui s'emparait de ses biens et de tous les héritages qui lui étaient échus ou qui pourraient
lui échoir pendant 50 ans à dater de la promulgation de la loi du 28 mars, sans qu'on pût opposer la mort naturelle survenue dans l'intervalle.
Monique de Gouy et sa fille Aurore des Salles sont inscrites sur la liste du département de la Meuse du 5 février 1793. Or ces listes étaient remplies
d'erreurs et pour éviter les effets de l'inscription sur la liste des émigrés, il fallait s'en faire rayer par une procédure qui devait supprimer à peu
près toute possibilité
de fraude.
Aurore allait avoir 14 ans et sa mère jugea nécessaire que sa fille revienne en France pour que, bénéficiant de sa minorité, elle puisse être radiée
de la dite liste.
712. Gouy (Marie-Louise-Henriette-Monique de), femme en premières noces
de Louis-Antoine-Gustave, comte des Salles, et en secondes noces de
l'émigré Barthélemy, comte d'O'Mahony ; Rigny-la-Salle. Em II, 47,731,
éliminée d'après l'arrêté du gouvernement du 28 vendémiaire an IX (20
octobre 1800).
475. Des Salles (Aurore-Louise-Monique), fille de Louis-Antoine-Gustave,
comtes des Salles et de l'émigrée Marie-Louise-Henriette-Monique de Gouy ;
Rigny-la-Salle. Em II, 73, radiée provisoire 7 juin 1793, éliminée 19 prairial
an IX (8 juin 1801).
Ainsi le citoyen Jean-André Hystes, demeurant à Port-sur-Seille (Meurthe-et-Moselle) la ramena en France. Elle fut effectivement radiée (provisoire)
de la liste des émigrés le 7
juin 1793 par le département de la Meuse, mais ce que n'avait pas prévu sa mère c'est que, demeurant chez son oncle de Ludre, celui-ci l'épousa l'année
suivante (28 thermidor an II,
BMS Port-sur-Seille 1793-1872 vue 221/601)
, à l'insu de ses parents, au château de Port-sur-Seille. Elle avait 15 ans,
il en avait 53 (et était veuf depuis 13 ans) !
L'autorisation qui est indispensable, puisqu'Aurore est mineure a été donnée par deux voisins de Port sur Seille, "les citoyens républicains Chipel et Menil".
On dit dans la famille que Monique fut très contrariée quand elle apprit cet événement et encore plus quand le mari viola allégrement les dispositions
du testament du comte des Salles qui avait institué Monique son unique héritière (ce qui reste à vérifier !).
"Le départ précoce d'Aurore et son éloignement définitif du foyer parental ont
sûrement exercé une influence sur la nature des liens qui se sont tissés entre
Arsène et ses parents. S'ajoutant aux épreuves et aux deuils vécus depuis le début
de la Révolution, ils ne purent que renforcer l'hostilité foncière aux idées
nouvelles d'une cellule familiale de plus en plus angoissée aussi bien pour son
avenir que pour celui de son pays" (Général Bertrand O'Mahony).
Le château de Port-sur-Seille (côté ferme) avant les ravages de la guerre de 14-18
(il ne reste plus que des vestiges du donjon)
Le 30 janvier suivant, les livres qui étaient dans la maison mahony à Nancy, sont enlevés et placés à la bibliothèque publique de la ville. L'inventaire portait qu'il y avait un exemplaire de l'Encyclopédie, édition de Liège in 4°, comptant 74 volumes reliés, et de plus, trente quatre brochés et environ cent cinquante volumes de différents ouvrages de différents formats, tant reliés que brochés .
Le 5 thermidor an II, ou 23 juillet 1794, Louis-Marthe est guillotiné et son corps est transporté au cimetière de Picpus où sa tombe cotoie encore celle de La Fayette.
Sa mort fut suivie d'une confiscation qui comprit les biens de son père. Elle dura jusqu'à la loi du 12 plairial an III (31 mai 1795).
Louis Marthe de Gouy d'Arsy, frère de Monique
Le 4 septembre 1794 (18 fructidor an II) la mère de Monique qui avait été longtemps indécise relativement à la communauté qui avait existé entre elle et son mari,
y renonce par acte passé chez Me Boursier, notaire à Paris, pour s'en tenir à ses reprises et créances.
A cette époque Monique
était mariée à un irlandais, l'avait suivi dans sa patrie et fut cependant inscrite sur la liste des émigrés.
En effet quand Barthélemy s'installe à Londres en septembre 1794, Monique et Arsène l'y rejoignent. Ils y resteront toute l'année 1795. Dans une lettre datée du 12 juin, Monique dit y avoir
installé une maison. Cette situation n'empêche pas Barthélemy de gérer les affaires des neveux de Monique, enfants de Louis-Marthe
tuteur des habitations de Saint-Domingue pour mes neveux et curateur pour ma belle-sœur d'après l'avis de colons de Saint-Domingue,
fait à Londres le 2 septembre 1794, pour gérer ou faire gérer les dites habitations, pour le plus grand avantage de ma belle-sœur et de mes neveux, qui sont restés en France,
et ce, du moment où elles seraient sous la domination du gouvernement anglais.
En 1795 le franc devient l'unité monétaire française. La livre est très légèrement supétieur au franc (0,9877 franc). On trouve des lors dans les documents des sommes exprimées
tantôt en franc, tantôt en livre.
Déjà Monique cherche à rentrer à Paris pour tenter de sauver ses biens. Dans
un premier temps elle rejoint l'Allemagne où Barthélemy se retire après la dissolution du régiment de Broglie. Elle y communique plus facilement avec ses hommes d'affaires
à Paris, dont précisément
Vincent Corneille, qui est le dépositaire de tous les papiers Gouy d'Arsy.
Elle
était à Hambourg de novembre 1795 à mai 1796 puis à Brunswick jusqu'en
1800. C'est à Brunswick, où le roi Louis XVIII se trouvait, que Barthélemy est confirmé maréchal des camps par un brevet du 10 juillet 1796.
Elle y louait une maison, avait une femme de chambre, Mademoiselle
Dorothée, et possédait une voiture. C'est là qu'elle a rédigé un
état de sa
fortune et que, le 6 mai 1799, Barthélemy rédige un "plan d'études" pour son fils, âgé de 12 ans. La santé de Monique était, dit-elle, dans un état déplorable. Ceci
nous est confirmé par des lettres de Serène de Narbonne, qui déjà en 1796,
en parlait dans ses lettres aux d'Héricourt, amis des O'Mahony : «
Elle est toute
différente de ce qu'elle était avec son premier mari et elle me semble qu'elle a beaucoup
changé à son avantage en conservant sa gaité et sa tournure d'esprit » ; «
Sa santé n'est pas
bonne et elle est menacée de fistule » ; «
Elle réussie fort bien dans la société où elle est vue
avec plaisir, mais ne veut pas paraître à la cour à cause de sa santé qui n'est point
bonne. »
Monique confirme cet état de santé dans cet autre courrier : «
Elle [sa fille
Aurore] sait que depuis sept ans que je suis dans la plus affreuse détresse, je n'ai pas reçu
le plus léger secours d'aucun des miens qu'une somme de mille écus que son mari m'a
envoyé au mois de septembre 1797, acompte sur celles considérables qu'elle me doit1, et
que, ne pouvant avoir aucun crédit en pays étranger, je n'ai pu y exister pendant un si
longtemps, surtout dans l'état déplorable de ma santé, qu'en faisant des opérations de
finances les plus onéreuses, pour y trouver les fonds nécessaires pour subsister. »
Le 1er novembre 1796 (11 brumaire an V
BMS Port-sur-Seille 1793-1872 vue 22/601), Aurore met au monde au château de Port-sur-Seille, Charles, plus tard comte de Ludre, officier de dragons et député de la Meurthe, dont le fils Auguste-Louis,
comte de Ludre et marquis de Frolois, épousera Valentine Le Gonidec de Kerdaliel, qui sera la marraine de Patrice O'Mahony (1887-1936).
La loi du 9 floreal an III voulait que les ascendants d'émigrés fasse avec la République le partage de leur présuccession. A cet effet la marquise de Gouy
fournit le 19 germinal an V (8 avril 1797) la déclaration de ses biens, et le partage allait se faire lorsqu'elle décèda
le 18 octobre 1798 (27 vendémiaire an VII) dans sa maison de la rue Cassette, âgée de 75 ans (elle est enterrée au cimetière de Picpus, auprès de son fils).
Ses héritiers sont Monique et les fils de Louis Marthe.
Le mobilier de sa maison est vendu après qu'en ait été enlevés le gros
diamant blanc estimé 30 à 40 000 livres (qui sera vendu par la veuve de Louis-Marthe plus de 45 000 francs papier), 7 000 francs en or,
l'argenterie évaluée à 9 000 francs,
25 à 30 boîtes d'or et d'écaille, les montres dont une enrichie de diamants, bijoux d'or et garnis d'or, des pièces d'étoffe de soie, dentelles, linge et
autres effets, etc.
Comme mère d'émigrée, et émigrée elle même, la marquise de Gouy avait fait le partage anticipé
de sa succession avec la République. Le 19 août 1799 (2 fructidor an VII) un arrêté du département de la Seine fait le partage, divisant le patrimoine
de la marquise en 3 parts : une pour la République à cause de la "prétendue émigration" de Monique, une pour les enfants de Louis-Marthe, et la troisième pour
leur mère (comme si elle était encore vivante), avec un préciput
[avantage donné à un héritier] de 20 000
livres.
Le 31 août (14 fructidor) l'affaire est définitivement jugée et il est notamment précisé qu'
outre que madame O-Mahony a été éliminée,
elle justifie qu'elle est femme d'un étranger, qu'à ce titre elle est réputée étrangère elle-même,
qu'en ce cas l'acte qui la constitue en prévention d'émigration doit être considéré comme non avenu, ainsi que l'a décidé le Conseil d'Etat dans son avis
du 9 thermidor dernier, d'où il suit qu'elle a toujours fait partie de sa famille pour ses droits civils, que son absence l'a empêché d'exercer,
mais qu'elle recouvre quand elle se présente.
La veuve de Louis-Marthe, qui avait obtenu la possession provisoire des biens de son mari, en continuait l'administration. Leurs revenus produisaient en assignats des sommes considérables.
Quand les assignats cessèrent d'avoir cours, les créanciers de la succession du marquis de Gouy se présentèrent à la belle sœur de Monique
pour être payés. Celle-ci, ayant peur de la saisie réelle des biens des deux succcessions (père et fils), leur en fit l'abandon général
le 29 mars 1799 (9 germinal an IX).
En émigration, les O'Mahony devaient faire des emprunts pour vivre. Parmi les derniers emprunts contractés par Monique à Brunswick celui de six cents livres sterling fait par billet du 10 juillet 1799 à son beau-frère Eugène O'Mahony
à Molakiffe en Irlande, est particulièrement intéressant car il montre que Barthélémy et son frère étaient toujours en relation.
Le dernier emprunt effectué est celui de 200 livres fait le 10 mai 1800, sans billet, auprès de Madame la princesse héréditaire de Brunswick.
Nous avons peu de renseignements sur cette période. Monique rapportera plus tard cette anecdote :
«Quelque temps après la mort de ma mère, ma belle-sœur me fit parvenir en Allemagne, où j'étais alors, une boîte d'or octogone, sur laquelle étaient huit portraits auquels ma mère attachait un grand
prix, et me fit mander [dire], par la personne qu'elle en chargea, que c'était tout ce qu'elle avait pu sauver de la succession de sa belle-mère. Qu'on juge de mon étonnement, lorsqu'en rentrant je trouvai mes neveux jouissant de plus de 60 000 livres de rente de cette succession
dont leur mère m'avait envoyé, en une boîte d'or, tout ce qu'elle avait pu en sauver ! »
Le 3 février 1800 (14 pluviose an VIII) le gouvernement,
qui représentait Monique, renonça pour elle à la succession de son père pour s'en tenir au legs de 400 000 livres que Louis de Gouy lui avait fait pour la remplir de ses droits de succession.
Ayant obtenu sa radiation de la liste des émigrés par l'arrêté du gouvernement du 28 vendémiaire an IX (20 octobre 1800), Monique rentre en France
pour tenter de recouvrer ses biens saisis par la Nation. Elle demande également à sa belle-sœur le partage de la succession de sa mère, en offrant d'imputer sur
sa part le tiers prélevé par la nation (ce qui réduisait à un sixième son droit dans la succession) et en déclarant vouloir exécuter en tout l'acte du 2
fructidor an VII.
Quant à Arsène, il était avec sa mère à Paris puisqu'en 1804 elle lui écrivait : "
Depuis 17 ans bientôt que tu es au monde, je ne t'ai pas quitté 24h, excepté pendant un mois,
lorsque tu avais 2 ans, et qu'à peine tu pouvais le sentir" . Le 11 juillet 1800, un conseil de famille présidé par Eugène O'Mahony, frère aîné de
Barthélemy se réunit à Tralee (Comté de Kerry, Irlande) "
pour prendre en charge les intérêts d'Arsène O'Mahony, enfant mineur qui
se trouve probablement, aujourd'hui sans protecteur et sans appui en France". Il faudrait sans doute ajouter "
autre que sa mère, dont
les intérêts peuvent être en conflit avec ceux de son fils". Il s'agissait, en effet, de défendre les droits et intérêts du mineur toutes les fois qu'ils se trouveront en opposition avec ceux
de sa mère, à demander en justice l'exécution du codicille fait olographe par Louis de Gouy son ayeul à Paris le
18 janvier 1789. Le dit conseil désigne alors comme procurateur
et tuteur d'Arsène, l'abbé O'Connor à Paris, cousin [mort à Paris en 1819 âgé de 74 ans, il avait été aumonier de la Brigade
irlandaise] conseillé par Vincent Corneille, homme de loi [de Monique], à Paris également.
Le conseil était composé d'Eugène O'Mahony, de Molahiffe (frère de Barthélemy), Daniel O'Mahony, de Dunloe (cousin, dit "major O'Mahony", petit-fils du "grand et terrible papiste"), Kain O'Mahony, de Killanah, Miles O'Mahony, également de Killanah, de Jacques O'Mahony, de la ville de Killarney, de Thomas et Christophe Gallwey (le père et le fils ; Thomas, décédé à Killarney le 8 décembre 1817, a épousé Mary O'Mahony de Dunloe), aussi
de la ville de Killarney, Edward Dunne (ou Duun, époux de Mary O'Mahony, tante de Barthélemy) de la ville de Tralee, Jean Neaphy, aussi de la ville de Tralee.
Nous avons le compte-rendu non daté d'un autre conseil, qui se tint sans doute à Paris, avec du côté paternel Daniel Bernard, abbé O'Connor ; Daniel, comte O'Connell, cousin ;
Vincent, prince de Giustiniani, cousin [arrière-petit-fils de Daniel O'Mahony,
le brave de Crémone] et du côté maternel de Thomas Louis Genevoise de Morant, ancien colonel,
cousin issu de germains [petit-fils de Gabrielle de La Rivière]; Hugues Thibaut Henry Jacques de Lusignan, ancien maréchal de camp, cousin issu de germains [Lezay-Lusignan, cousin de La Fayette] ;
Charles Emmanuel Sigismond de Montmorency Luxembourg, cousin (au 8e degré).
Le 30 septembre 1800 (18 vendémiaire an IX) Aurore met au monde à Port-sur-Seille Auguste de Ludre (
BMS Port-sur-Seille 1793-1872 vue 32/601), dont le fils, Gaston, comte de Ludre, auteur d'un livre sur Charles X et d'un autre sur Napoléon IV, sera
témoin en 1881 au mariage de Maurice O'Mahony et Marthe de Pontbellanger, mariage dont il fut à l'origine, dit-on dans la famille.
Par arrêté du 8 thermidor an IX (28 juin 1801) le préfet a fait main-levée du séquestre au profit de Monique de sa maison de la Chaussée d'Antin (alors appelée rue du Monc-Blanc, depuis 1793 et jusqu'en 1815 où elle retrouvera son nom originel) à Paris dont la valeur est alors estimée à 90 000 francs,
qu'elle tenait de la succession de son père et dont la moitiée était occupée par l'Administration des Charrois de la République par bail qu'elle avait fait le 12 vendémiaire an IV (4 octobre
1795). Cette maison avait été saisie comme bien national, rendue le 12 fructidor an III (29 août 1795) et sequestrée de nouveau le 17 frimaire an VII (7 décembre 1798).
Pendant ce temps Barthélemy doit être en Angleterre,
probablement sans affectation.
Le 15 septembre 1801 Monique rend le compte de tutelle d'Aurore par lequel les dépenses excédent les recettes de 151 341 livres dont Aurore se trouve donc débitrice
envers sa mère. Monique, "prenant en considération la situation de Mme de Ludre", ne lui réclame que 100 000 livres, remboursables dans un délai de 5 ans
avec intérêt à 5%.
En avril 1802, "avec la permission du Roi d'Angleterre", Barthélemy quitte la Grande Bretagne pour se mettre au service du
Portugal. Il avait également obtenu que son fils Arsène, alors âgé de moins de 15 ans, l'accompagne en qualité d'aide de camp avec le grade de Capitaine dans la cavalerie portugaise.
Arrivé à Lisbonne, Barthélemy obtint un congé de six mois pour aller chercher à Paris son épouse et son fils, et
régler ses affaires ...
Arsène O'Mahony en tenue d'officier portuguais
Il convient ici de rappeler que le 26 avril Bonaparte, premier consul, avait proclamé la loi d'amnistie
accordée pour fait d'émigration. Mais parmi les conditions permettant d'en bénéficier, il fallait rentrer en France avant le 1er
vendémiaire (23 septembre 1802) et ne pas avoir
eu des grades dans les armées ennemies. De ce fait Barthélemy n'était donc pas qualifié pour l'amnistie, ce qui n'était pas le cas pour Monique.
Le 3 décembre 1802, Barthélémy tente de racheter son ancienne maison de Nancy (rue d'alliance, n°33), mise en vente par les citoyens Forel et Joussau qui l'avaient acquise
comme bien national. Le procès-verbal de la vente indique que : «
Est aussi comparu le Cen Barthélemy O'Mahony, général au service du Portugal, actuellement à Paris,
rue Cassette N° 824, par le Cen Nicolas François Demetz, jurisconsulte demeurant à Nancy, son procureur fondé, qui se porte pour lui ; lequel, sous la réserve de déclaration de
commande, a déclaré faire mise de la somme de trente trois mille francs, sur la maison énoncée au dit verval, et aux clauses d'icelui, et a signé, lecture faite. »
En 1803 le syndic des créanciers de la succession du marquis de Gouy et de son fils procède à la vente des immeubles qui la composent.
Le 9 mars (18 ventôse an XI), se tient à l'audience des Criées du
Tribunal Civil de Première Instance du Département de la Seine, séant au
Palais de Justice à Paris, l'adjudication définitive des biens provenant de la
succession de Louis de Gouy, situés dans l'Oise, à savoir la terre d'Arsy et
dépendances, la ferme d'Estrées Saint-Denis et dépendances et huit lots de
terres à Canly. Le produit de la vente des biens est de 1 2000 000 francs, ce qui ramène le passif de la succession à 1 055 365 francs.
La succession doit notamment 400 000 francs (+ 80 000 francs d'intérêts) à Monique.
Les immeubles vendus, l'administration par le syndic continue pour tous
les autres biens.
Se trouvant donc à Paris au mois de mai 1803 (rupture de la paix d'Amiens), Barthélemy, qui possédait également la nationalité britannique,
fut compris, avec son fils, dans "la mesure arbitraire" de Bonaparte, constituant
prisonnier de guerre tous les sujets britanniques qui étaient en France.
"Mis en surveillance", ils resteront assignés à résidence pendant toute la durée de l'Empire (1804 - 1814) dans les différentes villes
que le gouvernement français assignait pour prisons aux officiers étrangers. C'est ainsi qu'ils ont successivement habité
Orléans, Fontainebleau, Nancy et enfin Versailles. A partir de 1813, plusieurs documents indiquent leur présence à Paris (38 rue Cassette, 58 rue de Provence, rue Traversière).
Dans son livre
Rose Bertin, Ministre des
modes de Marie-Antoinette, l'auteur écrit : «
Ainsi de l'affection liait certaines clientes à
Melle Bertin, comme la comtesse de Gouy-O'Mahony qui, devenue vieille, et se remémorant
les robes de sa jeunesse, fait part à la marchande de mode du "très sincère attachement"
qu'elle lui a porté "il y a si longtemps". »
Il s'agit d'une lettre datée de 1805 à
Fontainebleau, où, précise l'auteur, le comte était en exil. Cette anecdote est intéressante car elle indique que Monique était à Fontainebleau avec son mari et aussi parce qu'elle montre que Monique était cliente de
Rose Bertin avant la révolution.
Suite à une saisie immobilière, l'usufruit de l'hôtel de la rue de la Chaussée d'Antin est vendu au profit des créanciers de Monique, et c'est Arsène qui s'en rend adjudicataire
(jugement du 5 août 1813).
A la demande de Monique, la famille de ses neveux s'assemble devant le juge de paix le 24 nivose an XI (14 janvier 1803) et approuve le compromis proposé
à sa belle-sœur concernant la succession de sa mère,
et la nomination d'arbitres (ceux de Monique furent Me Trutat, notaire, et M. Siméon, plus tard ministre de l'intérieur). Les arbitres rendent leur décision
le 26 messidor an XI (15 juillet 1803). Des experts furent nommés pour désigner les biens devant composer son lot et leur procès verbal homologué et enterriné le
3 floréal an XII (23 avril 1804). Les biens dont la valeur était de 602 800 livres rapportaient 23 513 livres par an.
On connait ceux situés dans l'arrondissement de Pontoise, qui lui apportent un revenu annuel net de 18 000 livres et qui sont :
- La ferme dite Saint-Denis, dans la commune de Chars, consistant en un corps de logis , un superbe moulin à eau, 83 hectares de terre labourable sur lesquels sont plantés ormes, pommiers et poiriers,
4 hectares de pré et patures, et deux remises à gibier ;
- Un corps de ferme situé au village de Gérocourt, consistant en un corps de logis, un clos dans lequel est le jardin potager, 40 hectares de terre labourable sur lesquels sont
plantés des ormes et des pommiers ;
- Un bois situé dans cette même commune de Gérocourt ;
- Un superbe corps de ferme situé au milieu du village de Bréançon consistant en un corps de logis, 133 hectares de terre labourable, prés et patures sur lesquels sont plantés ormes, griboux et peupliers, pommiers et poiriers, et trois remises à gibier
d'une contenance de 2 hectares ;
- Un corps de ferme, situé au hameau de Rosnel, commune de Bréançon, consistant en un corps de logis, 84 hectares de terre labourable, pré et patures sur lesquels
sont plantés chênes, ormes, peupliers, frênes, saules ;
- Dix parcelles de bois situés dans la commune de Bréançon.
Monique pensait la succession de sa mère enfin réglée, mais c'était compter sans son neveu Emmanuel de Gouy d'Arsy, qui ayant atteint sa majorité en novembre 1803, attaqua tout à la fois l'arrêté de la préfecture, la délibération du conseil de famille, la transaction solennelle que sa mère avait consentie en son nom, la décision arbitrale, les opérations des experts
et tout ce qui s'en était suivi ;
et cela pour arracher à sa tante émigrée et malheureuse le sixième de la succession maternelle. Il se pourvut
au conseil d'Etat en nullité de tout ce qui avait été convenu et obtint gain de cause le 26 vendémiaire an XIII (18 octobre 1804) par un arrêté annulant celui du 24 fructidor an X et tous actes subséquents.
Suite à la vente en 1803 des biens de la succession de Louis de Gouy, un jugement du 29 messidor an XIII (18 juillet 1805) attribua à Monique
442 306 livres réparties comme ceci :
colloquée en ordre utile [colloquer des créanciers = les inscrire dans l'ordre où ils doivent être payés] comme créancière pour 163 932 livres et comme
légataire sans inscription pour 549 011 livres, soit un total de 712 943 livres sur lequel
il faut déduire 336 237 livres dus à ses créanciers, qui ont demandé à être
colloqués en sous ordre.
Privée de tous ses droits dans la succession de sa mère, il ne lui reste pour unique ressource que les créances qu'elle avait contre la succession de son père.
Elle adhéra donc à la direction des créanciers, adhésion motivée par son intérêt à rendre cette succession profitable. Un
arrêt rendu le 12 mars 1807 par la cour d'appel de Paris accorde à Monique la préférence sur les légataires particuliers de son père pour son legs
de 400 000 livres et ordonne en conséquence qu'elle soit colloquée dans l'ordre du prix des biens de son père immédiatement après les créanciers de la succession et avant tous les légataires particuliers.
Dans le courant de l'année 1812,
Monique et la direction des créanciers de son père, font une demande en liquidation de reprise et indemnité contre la succession
de sa mère. En raison de cette demande il a été pris une inscription hypothécaire de 600 000 francs par Monique (et sa fille) sur les biens de ses neveux.
Ceux-ci lui font savoir que dans le cas ou les créanciers parviendraient à obtenir des condamnation contre eux, ils la forceraient à supporter moitié de ces condamnations !!!
« Comment MM. de Gouy ont-ils l'impudeur de faire une semblable demande ? Ils ont envahi la fortune immense de ma mère ; ils m'ont refusé le partage que je réclamais de ses biens, et ils veulent aujourd'hui m'attribuer la qualité d'héritière pour me faire partager une condamnation qui va les atteindre ; comment et par quel raisonnement ces messieurs soutiendront-ils un système aussi odieux ? comment trouveront-ils un avocat pour le plaider ?
Mes conseils répondront, quand il sera temps, à la prétention extraordianire de MM. de Gouy ; je crois inutile de le faire dans ce moment :
la Cour qui va nous juger ne sait point encore si la succession de ma mère sera débitrice envers celle de mon père ; si ce cas arrivait, j'ai établi l'intérêt que j'avais à ce que la liquidation se fit ; mais si au contraire, comme MM. de Gouy le prétendent,
la succession de ma mère, loin d'être débitrice, était créancière de la succession de mon père, j'aurais encore intérêt à demander la liquidation. Dans les deux hypothèses, mon adhésion aux conclusions des syndics est fondée et j'y dois persister. »
Le 23 août 1814, Louis XVIII confère à Barthélemy le grade de
lieutenant général et la dignité de commandeur de l'Ordre royal et militaire de Saint-Louis, sans pour autant lui confier aussitôt un commandement.
Monique, qui a besoin de son mari pour régler ses affaires de succession, adresse une note confidentielle au général baron Brun de Villeret pour qu'il
intervienne auprès du ministre en vue d'une nomination de Barthélemy
à Paris.
Cette note n'est pas datée, mais a été écrite entre le 18 décembre 1814 et le 14 mars 1815, période durant laquelle le baron Brun était secrétaire général du ministère
de la Guerre.
Note confidentielle de Mme la comtesse O'Mahony pour Monsieur le général baron Brun.
Comme j'espère que Son Excellence Monsieur le Maréchal Duc de Dalmatie est dans l'intention d'obtenir des bontés du Roi, que Mr O'Mahony, mon mari,
soit employé le plus tôt qu'il sera possible dans son grade de lieutenant général, j'ai l'honneur de prier monsieur le général baron Brun de m'accorder ses bons offices, pour
qu'il le soit à Paris ou à peu de distance. Le motif qui me fait solliciter cette faveur est que nous y sommes domiciliés et établis en famille, et que sa présence y est indispensable pour suivre et terminer des affaires très importantes que nous y avons pour la liquidation des successions
du marquis et de la marquise de Gouy, mes père et mère, de laquelle dépend toute notre fortune. J'ose espérer que Monsieur le Maréchal voudra bien prendre ces motifs en considération si monsieur le général baron Brun veut bien les lui présenter avec intérêt.
Le 20 décembre 1815, Barthélemy a l'autorisation de résider rue neuve saint-Augustin (actuelle rue Saint-Augustin), n°10, à Paris.
Monique intervient encore pour aider son époux à obtenir un emploi à Paris.
Après avoir tenté sans succès un rendez-vous avec le ministre, elle lui écrit le 15 septembre 1816.
Lettre du 15 septembre, écrite du 10 rue neuve Saint-Augustin
D'après la lettre que votre Excellence a bien voulu me faire écrire, j'ai vu que je devais renoncer au désir que je lui avais témoigné, à voir
de l'entretenir d'une chose qui m'interpelle ; mais comme elle m'a fait savoir en même temps que je puis lui exposer par écrit l'objet de ma demande
et qu'elle daignera la prendre en considération, et y répondre, j'ai l'honneur de vous adresser, Monsieur le Maréchal, un mémoire que le Cte
O'Mahony m'a envoyé de Bourges où il est encore, dès qu'il a été informé que sa retraite lui était donnée. La bonté, l'ancienneté, et la fidélité de ses services,
sont trop connues du Roi, qui a toujours daigné lui en témoigner sa satisfaction pour que je ne doive pas espérer que si vous voulez bien,
en mettant sa demande sous les yeux de S.M. l'appuyer de votre intéret, elle lui soit accordée. Je me joins à lui, Monsieur le Maréchal, pour vous en supplier,
et aussi que d'agréer, avec bonté, l'assurance de la reconnaissance que nous en éproverons tous les deux et l'hommage de tous les sentiments avec lesquels j'ai
l'honneur d'être, ...
Le 30 octobre 1816 est soumise au Roi la demande qu'il a faite le 13 d'un congé de trois mois pour se rendre à Paris "afin de régler des affaires de famille de la plus
haute importance et y faire un emprunt afin d'acquitter des dettes qu'il a été dans la nécessité de contracter pour représenter
dignement dans l'emploi qui lui a été confié". La demande est refusée car "Sa Majesté juge utile au bien de son service que vous ne quittiez pas en ce moment votre commandemant", mais le Roi lui attribue une gratification extraordinaire
de 4 000 francs pour soulager la gène "où se trouvait cet officier général par suite des frais de représentation que lui occasionne son commandement."
Le 28 novembre, c'est la comtesse O'Mahony qui s'adresse au ministre. Le 12 décembre la demande enfin est acceptée et le 22 décembre Barthélemy
donne au ministre les dispositions de son remplacement provisoire ! Le 10 mars 1817, Barthélemy demandera une prolongation de sa permission jusqu'au 1er mai.
Lettre du 28 novembre écrite du 10 rue neuve Saint-Augustin
La dernière audience de Votre Excellence s'étant terminée avant que mon fils put être introduit devant elle, j'ai l'honneur de vous adresser, Monsieur le Duc, le lettre dont son père l'avait chargé
pour vous. L'extrème importance que nous mettons, Mr. O'Mahony et moi à savoir ce que votre excellence décidera à ce sujet, m'enhardit à la prier de vouloir bien dire un mot de ses intentions à Mr. de Fleuranges, qui me le transmettrait. Dans toute notre position
je ne permettrais pas d'être si importune, mais votre réponse, Monsieur le Maréchal, devant influer exclusivement sur le résultat d'une affaire qui exige un grand travail préparatoire, et dont tout ma fortune va dépendre, j'espère que votre Excellence,
en faveur d'un motif d'un si haut intérêt, voudra bien excuser mon indiscretion ; et j'ai l'honneur de lui observer que la présence de mon mari est indispensable avant la fin de l'année.
J'ai l'honneur etc.
Le 21 août 1817 Monique écrit une
lettre à Barthélemy qui réside à Rennes où il commande la 13e région militaire, pour leurs noces de perle (30 ans de mariage).
Le 5 juillet 1819, Barthélemy est témoin au mariage à Rennes
de sa parente Charlotte Jacquemine Le Vaillant avec Louis Charles Putecotte de Reneville, garde du Corps. Monique et Arsène l'accompagnent et signent le registre avec lui.
En 1820 le couple s'établit à Versailles, 88 rue Royale. Arsène habite tout près, rue Saint-Honoré, n°1. Barthélemy conserva néanmoins son domicile parisien
(celui de la Chaussée d'Antin).
La rue Royale à Versailles (en rouge) et la rue Saint-Honoré (en bleu) avec le cimetière Saint-Louis
-plan ancien (1839)-
Le 88 rue Royale (immeuble en jaune) est à l'angle de la rue du Sud (aujourd'hui rue Albert Samain)
La numérotation ne semble pas avoir changée depuis cette époque
-Google street-
En 1822 Monique reçoit la succession de Mademoiselle de Régis, décédée à Provins le 18 octobre. Elisabeth de Plas de Régis, religieuse bénédictine, était une grande-tante de Monique.
Monique décède à Versailles le 4 avril 1823, en son domicile versaillais âgée
de 73 ans. Les témoins qui signent la déclaration (
décès Versailles 1823 vue 72/183) sont le marquis de La Londe, maire de Versailles, et le marquis de Bailly, député.
Barthélemy y est dit résider l'hôtel de la chaussée d'Antin. Elle est enterrée au cimetière tout proche de Saint-Louis.
L'inventaire après décès, effectué à Paris et à Versailles, débute le 28 avril par Me Fourchy, notaire à Paris [MC ET/LVIII/696]. Au cours de cet inventaire Me Briot déclare qu'à sa connaissance le legs de 400 000 livres
fait par le marquis de Gouy à Monique et à Arsène n'a pas été acquitté et que sur les intérêts Monique n'a touché que diverses provisions dont l'importance est
d'environ 45 000 francs. Il déclare également que la vicomtesse de Ludre a remboursé les 100 000 livres dues à sa mère.
Monique avait rédigé un testament le 1er janvier 1812.
Au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit
Je meurs dans la religion catholique, apostolique et romaine. Je demande pardon à Dieu, à mon mary, à mes enfants, parents, amis et domestiques du scandale que j'ai pu leur causer.
Je les prie de prier Dieu pour moy et de me conserver quelques souvenirs.
Je veux être enterrée avec la plus grande simplicité. Je prie mon bon mary et mon excellent fils de faire dire cent messes pour le repos de mon âme, par un
bon prêtre, bien pauvre, et de les entendre si cela leur est possible.
Je nomme et institue monsieur O'Mahony, et, à son défaut, mon fils, pour mon exécuteur testamentaire.
J'institue madame de Ludre, née des Salles, ma fille, et mon fils Arsène O'Mahony, mes héritiers ; mais ayant donné à madame de Ludre, ma fille, lors de mon arresté de compte de tutelle avec elle,
le quinze septembre mil huit cent un, la somme de cinquante un mille trois cents quarante livres douze sols deux deniers tournois (laquelle elle a acceptée), je
veux et entend que cette somme dont je ne lui fis la remise alors qu'en considération des embarras qu'elle éprouvait alors dans sa fortune, mais dont je ne pouvais entendre et
n'ay entendu la faire jouir que par avancement d'hoirie, soit reportée par elle à la masse de ma succession, ainsi que les intérêts de cette somme (si toute fois
il y a lieu pour des intérêts) depuis le quinze septembre mil huit cent un jusqu'au jour de mon décès, pour entrer en partage.
Voulant donner à monsieur O'Mahony, mon digne et excellent mary et l'objet de mes plus chères affections, des marques de ma sensible reconnaissance du
bonheur constant dont il m'a fait jouir pendant tout le temps qu'a duré notre union, et aussy pour luy assurer une existence dont il manquerait absolument après moy,
je luy donne et lègue, tant en propriété qu'en usufruit, tout ce que la loy me permet de luy donner, dans ma fortune présente et avenir, de quelque nature
qu'elle puisse être, et de quel lieu et de quelque personne elle puisse m'advenir. Et je veux et entend encore, que dans le cas, ou par quelque raison quelconque,
mon mary ne voudrait ou ne pourrait pas accepter le don que je luy fais, et en profiter, mon fils Arsène O'Mahony, soit subrogé, comme je le subroge par ces
présentes, en lieu et place de son père, pour qu'il jouisse de la donation faite à son père, et hors part, pour tout ce dont la loy me permet de disposer en faveur de mon fils.
Telle est ma volonté formelle et positive, telle j'entends et ordonne qu'elle soit exécutée par mes enfants.
Cet écrit, fait tout entier de ma main, saine de corps et d'esprit, renferme mes dernières volontés.
Fait à Versailles, le premier janvier mil huit cent douze, et je signe de tous mes noms et prénoms.
Marie Louise Henriette Monique de Gouy O'Mahony.
testament olographe
-cliquez sur miniature pour agrandir-
Elle laisse pour héritiers ses deux enfants, le
comte O'Mahony (Arsène) et la vicomtesse de Ludre (Aurore), qui ont
accepté sa succession sous bénéfice d'inventaire.
Les comptes faisaient apparaître une somme de 459 998 F pour laquelle les
prétendants sont les créanciers de la succession de la comtesse O'Mahony, le
comte Arsène O'Mahony, à cause du legs de 200 000 livres que son grand-père lui
réservait sur les 400 000 livres légués à sa mère, et la vicomtesse Aurore de Ludre
en raison de son legs de l'hôtel de la chaussée d'Antin. Ayant unis leurs efforts contre leurs cousins MM. de Gouy, ce sera à eux
maintenant de poursuivre les procédures...
Tombe de Barthélemy et Monique au cimetière Saint-Louis de Versailles
Cette stèle a été détruite lors de la grande tempête de décembre 1999 et restaurée en 2016.